CCi Bastia

Bullshit – Les 28 et 29 septembre s’est tenue une conférence ainsi que des « ateliers de formation » dans les locaux de l’IMF de Borgo (Haute-Corse) en présence des responsables de la cellule PME/TPE de Facebook France : Facebook, Accélérateur de croissance pour les PME. Rien que ça. Et comme en Corse nous sommes les plus forts et numéro un sur beaucoup de choses¹, il s’agissait d’une première en France (c’est Corse Matin qui le dit). Curieuse du discours que Facebook allait distiller aux chefs d’entreprises insulaires, et parce qu’il est primordial dans notre métier de se tenir informé des dernières nouveautés (on ne sait jamais), c’est avec plaisir que je m’y suis rendue.

Si on ne peut que saluer l’initiative de la CCI de Bastia Haute-Corse pour faire venir les équipes du réseau social afin de sensibiliser les patrons de PME et de TPE quant à l’importance d’assurer une (bonne) visibilité à son entreprise et ainsi développer ses affaires grâce aux outils qu’internet peut offrir,  j’ai été relativement déçue par ce que j’ai entendu par rapport à ce qui était annoncé. Parce qu’en fait, il n’agissait ni d’une « sensibilisation » ni d’une « formation » mais plus une sorte de Lobbing de Facebook autour de Facebook for Business (anciennement Facebook Ads…).

Qu’est ce que Facebook for Business ?

Facebook for business est la nouvelle plate-forme publicitaire de Facebook permettant de promouvoir les pages et les publications sur le réseau social.

La plateforme pour gérer les campagnes de sponsorisation Facebook
La plateforme pour gérer les campagnes de sponsorisation Facebook

Cette plateforme est pour le moins très intuitive et riche en contenus. Il y a tout un ensemble de tutoriels (vidéos et textes) afin d’administrer parfaitement sa page pour son commerce. À l’heure où j’écris cet article, je n’ai pas encore exploré toutes les fonctionnalités de Facebook for business,  mais cela ne saurait tarder. En effet, à première vue la plateforme offre tout de même de meilleurs outils pour calibrer les campagnes de sponsorisation. Il ne s’agit plus juste de « mettre en avant » une page/publication/offre et de choisir son audience (asv, centre d’intérêt), mais bien de mettre en place un certain nombre de paramètres et variables afin de gérer ses campagnes (telle une campagne google Adwords).

Autant dire que si le patron d’une PME/TPE à plusieurs heures et jours devant lui pour se former à l’utilisation de Facebook pour son entreprise, et si – à l’issue de son auto-formation – il a le temps de gérer sa page et ses campagnes de sponsorisation, alors il est clair que c’est une plateforme idéale pour lui. Parce que c’est bien connu, un chef d’entreprise (petite, moyenne ou grande) a beaucoup de temps à consacrer à son marketing. Si toutefois, celui-ci a conscience que Facebook et les réseaux sociaux ne doivent pas être considérés comme des gadgets pour son business…

(Mon) Retour sur les ateliers Facebook

Si le succès était au rendez-vous (plus de 200 personnes ont assisté aux ateliers), pour autant je ne suis pas sûre que la majorité des patrons présents aient compris ce dont parlait les intervenants Facebook : « engagement » , « reach », « search », « like », « display », « instagram », « définir ses objectifs marketing », etc.

Le discours était trop abstrait pour des personnes non initiées à la pratique numérique. Ce n’est pas moi qui le dis, mais ma voisine, entrepreneuse dans le mobilier urbain écologique de 29 ans qui me l’a avoué… et celle assise derrière moi également (patronne, d’une cinquantaine d’années, d’un commerce de proximité depuis 20 ans).

Bon déjà pour commencer, « Le mot du président » de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Haute-Corse en début de séance…. Sur le papier son discours est plutôt cool. Mettre en avant le fait que les patrons de PME/TPE insulaires doivent se soucier de leur visibilité sur internet à l’heure où les manières de consommer ont sensiblement évolué, que Facebook est un levier pour développer son activité et les relations avec ses clients c’est bien, mais peut-être que mettre un peu plus de conviction dans ses propos et savoir bien prononcer /ˈfeɪsbʊk/ (et non FACE-BOUC \fas\– \buk\) c’est mieux. Parce que si le président de la CCI himself ne croit pas en se qu’il dit/lit, je ne suis pas sûre qu’on avance dans « l’éducation » des chefs d’entreprises aux bonnes pratiques à mettre en place sur les réseaux sociaux. 

Après, il faut savoir que, globalement « les pratiques numériques dans les entreprises insulaires restent encore peu innovantes et leur niveau d’acculturation aux technologies numériques est encore trop faible » (baromètre numérique 2014, réalisé par la CTC²). Donc avant d’employer des termes propres au social média devant une assistance qui pense que les réseaux sociaux se limitent à raconter sa vie sur Facebook, il faut d’abord entreprendre un gros travail (un chantier) d’évangélisation.

En effet, lorsque je vais à la rencontre des patrons de PME/TPE corses pour présenter les avantages de la mise en place d’actions de community management et de webmarketing, le plus souvent,  j’ai beau leur montrer toute la passion que j’ai et que je mets au service de mes clients, leur démontrer les résultats commerciaux que j’obtiens, et leur expliquer le travail que cela demande en amont (d’où le fait que « oui forcément ce n’est pas gratuit et il faut établir un budget »); je peux vous assurer que la grande majorité n’en ont, tout simplement, rien à foutre.

Alors que les intervenants Facebook ont plus qu’insisté sur le fait (je cite) : « Avec Facebook vous pouvez cibler votre audience de façon fiable et précise », et « vous avez la possibilité d’adapter chaque message à chacune de vos cibles »,  ils ont donc oublié d’adapter leur discours à l’assistance. Pour preuve, au cours de la séance « Question/réponse », après 1h30 de blabla par l’équipe Facebook, j’ai été très attendrie par la question d’un chef d’entreprise insulaire, la cinquantaine bien entamée : « C’est bien beau tout ça mais : C’est quoi un fil d’actualité? ».  CQFD

Et sinon, qu’est-ce qu’on a appris ?

Même si concrètement, je n’ai pas appris grand chose.

Facebook en 2015 c’est :

  • 1,49 milliards d’utilisateurs actifs mensuels dans le monde (connexions)
  • Les 3/4 des utilisateurs ne sont pas américains
  • En France : Facebook compte 30 millions d’utilisateurs dont 24 millions se connectent sur mobile
  • 45 millions d’entreprises ont une page, dont 2 millions utilisent la sponsorisation (seulement?)
  • 75% des utilisateurs français sont connectés à une entreprise à travers leur page

Facebook, c’est aussi :

  • Une « grande famille d’applications »: Messenger, Instagram, WhatsApp (tiens? Ils ont oublié de parler de Pages?)
  • Une page c’est différent d’un profil (grosse stupeur dans l’assistance)
  • Des campagnes de sponsorisation dont le ciblage est fiable entre 70 et 89%
  • Des campagnes de sponsorisation dont la création est « gratuite », « gratuite », « gratuite » (heureusement…mais jusqu’à quand?)
  • Avec les campagnes de sponsorisation vous pouvez cibler votre audience (là encore : encore heureux…mais j’ai parfois des doutes…)

Il y a aussi plein de choses qu’on n’a pas appris :

  • D’où vient le décalage négatif (entre 10 et 30% de perte) entre le nombre de clics indiqué par Facebook sur un lien menant vers un site (donc potentiellement le nombre de visiteurs gagnés grâce à la sponsorisation) et le nombre de visiteurs réels indiqué par Google Analytics.
  • La raison pour laquelle Facebook refuse la sponsorisation de certaines publications en annonçant que « L’image de votre publicité ne peut contenir plus de 20% de texte » ? (raison invoquée : « Facebook veut privilégier les contenus créatifs » – sans commentaire)
  • Que fait réellement Facebook de nos données personnelles?
  • Comment lutter contre le piratage de profils?
  • Comment tester ses campagnes de sponsorisation à moindre frais ?

Bref autant de questions où les intervenants ont plus que pataugé pour apporter des réponses claires et honnêtes…

Facebook, fini le social, place au business

Vous allez (peut-être) qualifier mes propos d’hypocrites puisqu’en tant qu’agence de communication digitale, nous gérons les réseaux sociaux de nos clients. Cela serait donc un peu cracher dans la soupe que de critiquer un système qui concerne une partie de l’activité de Mad Monkeys Consulting. Et bien cher lecteur, sache qu’il en est tout autre puisque nos résultats démontrent que les actions de community management et de content marketing menées pour nos clients sur Facebook (pour ne parler que de lui) génèrent des croissances de chiffres d’affaire au-delà de ce que ces derniers pouvaient espérer. Et donc bien sur que nous encourageons nos clients à être présents sur ce réseau social (si le choix s’est porté sur celui-ci selon l’audience et le secteur de l’entreprise cela va s’en dire…).  Je parle bien de « community management » et « marketing de contenus« . Or, lors de cette « conférence » c’est bien cela qui a le plus heurté ma sensibilité de community manager. Jamais (je dis bien jamais) au cours de ces deux jours « d’ateliers » (comme Ils les appellent) il n’a été fait mention du travail de community management et la création de contenus créatifs à mettre en place afin de gérer une page entreprise. En fait, désormais pour Facebook, le réseau social se limite à mettre en place des campagnes de sponsorisation. Et les CM me donneront raison, sur Facebook désormais, on a beau mener un travail rigoureux et de qualité, et remettre en question celui-ci, si on ne booste pas les publications à coups de « mise en avant », la visibilité sera nulle et la portée organique sera pour ainsi dire minable.

Mais au final, le point positif à travers le discours abstrait employé par les intervenants de Facebook, c’est que les patrons de PME et TPE corses ont peut-être pris conscience que faire du marketing sur Facebook (et les autres réseaux sociaux) ne s’improvise pas et n’est finalement pas à la portée de tous. Il faut du temps et des compétences. Par contre, j’ose espérer qu’ils n’ont pas seulement retenu que le marketing sur les réseaux sociaux ne se limite pas seulement à la programmation de campagnes publicitaires…


 

¹ Le saviez-vous ?

Le Quick de Furiani est le PLUS GRAND D’EUROPE

La place Saint-Nicolas de Bastia est la PLUS GRANDE PLACE D’EUROPE

Le Coca Cola a été inventé par Mariani, un Corse (mais ça c’est vrai)

Le PREMIER concours de community management au MONDE a (presque failli être) organisé en Corse (enfin juste après les Shorty Awards)

² données disponibles ici

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