Loi Evin : quels sont les éléments à prendre en compte lors d’une campagne de marketing ou de communication digitale ?

1735; bière artisanale; loi evin; webmarketing

La Loi Evin (ou Loi du 10 janvier 1991) régule l’ensemble de la publicité et de la communication réalisées en faveur de l’alcool. Elle fut mise en vigueur en 1991 afin de réduire les méfaits de l’alcoolisme en France.

Face à cela, un dilemme fait surface : comment mettre en avant un produit alcoolisé sans enfreindre la Loi ? Cet article vous informera sur les modalités de la Loi Evin et vous donnera des éléments pour communiquer sur l’espace numérique, sans transgresser la Loi.

LOI EVIN : QUE DIT LA LOI ?

Bien qu’assouplie en 2016 suite à l’adoption de la Loi de « modernisation de notre système de santé », la Loi Evin limite considérablement la marge de manœuvre des producteurs de boissons alcoolisées. Mais que dit la Loi précisément ?

Loi Evin : ce qui est interdit

L’article 17 de la Loi Evin proscrit toute publicité de boissons alcoolisées à la télévision, au cinéma, sur certaines tranches horaires à la radio, dans la presse à destination de la jeunesse et plus globalement toute publicité incitant à la consommation d’alcool et visant les jeunes et les mineurs. Il faut noter que toute sponsorisation sportive est strictement interdite et que les affichages sont également encadrés.

En outre, cet article de Loi considère comme publicité « le graphisme, la présentation, l’utilisation d’une dénomination, d’une marque, d’un emblème publicitaire ou de tout autre signe distinctif, rappelant une boisson alcoolique ». (1)

Ainsi, la marque de champagnes Taittinger s’est faite condamnée en 2014 suite au non-respect de la Loi Evin. En effet, l’ANPAA a considérée que la maison de champagnes n’avait pas respecté la Loi en associant sa marque à la Coupe du Monde de football 2014.

Taittinger; Mondial Brésil; Loi Evin
Crédits photo: capture d’écran ANPAA

Pourtant, un contre-exemple existe. Pour passer entre les mailles du filet de la Loi Evin lors de l’Euro 2016 de football organisé en France, la marque Carlsberg a réalisé un coup de maître marketing en utilisant le slogan « Probably », tout en mettant en avant sa boisson sans alcool, sans mentionner le mot « bière » et sans afficher son logo dans les stades. Seule la typologie, facilement reconnaissable par les consommateurs de bières (et donc leur cible principale), fut utilisée. De plus, le fait de communiquer en anglais serait un argument suffisant pour dire que cette campagne publicitaire ne cible en aucun cas la population française, car il est bien connu que personne en France ne comprend l’anglais.

campagne "probably" Carlsberg
Crédits photo : capture d’écran Sky sports

Or, comme nous avons vu, le graphisme renvoyant à une boisson alcoolisée est interdite dans les messages publicitaires de ce type. Alors, pourquoi la marque Carlsberg n’a-t-elle pas été condamnée ?

Loi Evin : ce qui est autorisé

Ainsi, l’article 17 de la Loi Evin limite la publicité des boissons alcoolisées à « l’indication du degré volumique d’alcool, de l’origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l’adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d’élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit ». De ce fait, on ne peut communiquer que sur des caractéristiques dites « objectives » du produit. (2)

Toutefois, depuis la réforme de 2016, l’article 13 de la Loi de « modernisation de notre système de santé » fait une distinction entre publicité et contenus informatifs. Plus précisément:

« Ne sont pas considérés comme une publicité ou une propagande, au sens du présent chapitre, les contenus, images, représentations, descriptions, commentaires ou références relatifs à une région de production, à une toponymie, à une référence ou à une indication géographique, à un terroir, à un itinéraire, à une zone de production, au savoir-faire, à l’histoire ou au patrimoine culturel, gastronomique ou paysager liés à une boisson alcoolique disposant d’une identification de la qualité ou de l’origine, ou protégée au titre de l’article L. 665-6 du code rural et de la pêche maritime. » (3)

Ainsi, la communication faisant référence au savoir-faire, au terroir, à l’histoire ou aux traditions, entre autres, n’est pas considérée comme un message publicitaire. Ainsi, cette Loi s’adresse concrètement aux producteurs de vins et de boissons alcoolisées issues de traditions locales, comme le sont les bières artisanales, les cidres ou les poirés (selon l’article L665-5).

Tenant cela en compte, l’agence a développé une campagne publicitaire pour la brasserie Lutina, où le savoir-faire et la production de cette bière artisanale corse sont mis en avant. De cette façon, Lutina communique avec ses consommateurs et clients potentiels en mettant en avant ses produits et son expertise en tant que brasserie.

LA LOI EVIN ET LE DIGITAL

Longtemps restée dans une zone grise quant à la Loi Evin, la publicité dans le domaine numérique est de nos jours encadrée. Tout en respectant les conditions mentionnées ci-dessus, il est possible de communiquer sur l’alcool dans l’espace social media et plus largement sur le web.

Ainsi, bien que la publicité pour les alcools soit autorisée sur internet, il est cependant interdit de la diffuser sur des pages et des sites web destinés à la jeunesse ou liés au sport.
De ce fait, l’audience des sites et pages web sur lesquels nous diffuserons la publicité doit être composée à plus de 70% de personnes majeures. Les formats publicitaires employés doivent être clairement identifiables comme publicités, et ne doivent pas être intrusifs comme l’est une vidéo à lancement automatique, une fenêtre pop-up ou une bannière sur un site.

De plus, le message publicitaire peut communiquer uniquement sur les éléments objectifs de la boisson alcoolisée, sans inciter à la consommation ou à suivre nos réseaux sociaux. Le contenu publicitaire ne peut vanter les vertus de l’alcool, et ne peut mettre en scène des personnes buvant ou s’amusant (le consommateur ne doit à aucun moment apparaitre dans le message publicitaire). En outre, la publicité doit impérativement comporter le message sanitaire préventif suivant : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ».
Les réseaux sociaux comme Facebook, Instagram ou Twitter ne sont pas considérés comme étant principalement destinés à la jeunesse, et représentent de bons supports publicitaires.

En effet, si bien gérés, les réseaux sociaux favorisent la création d’une fan base qualifiée qui permet de contrôler votre image auprès des consommateurs, de générer des leads, d’augmenter le trafic vers votre site web, de fidéliser votre clientèle et d’augmenter le nombre de commandes entre autres. Il est de plus autorisé d’organiser des jeux concours sur les réseaux sociaux, pour autant qu’ils ne proposent pas un prix à gagner à caractère élitiste (un prix de valeur élevé).

Pour votre publicité digitale, pensez donc à mettre en avant votre savoir-faire tels les secrets de fabrication. Montrer les coulisses d’une production est toujours bénéfique pour une marque, et permet de donner un aspect humain par le moyen d’interventions des employés et démontrer sa volonté de transparence. Un story-telling captivant et original vous permettra de vous démarquer de votre concurrence, tout en attirant l’attention de votre client cible.

Un cas qui illustre une bonne exploitation du story-telling est le cas de la bière Amsterdam. La marque hollandaise a basé sa communication sur une histoire originale, celle du légendaire Hollandais Volant.

Un autre exemple de story-telling faisant appel ici à d’authentiques éléments historiques, est celui de la bière artisanale corse 1735. Par le moyen d’un story-telling faisant référence à la Constitution Corse de 1735, la marque communique par le biais de sa dimension historique.

Pour aller plus loin dans la communication de bières artisanales rendez-vous sur Bière artisanale : comment communiquer ?

Il est tout aussi intéressant de parler de boissons alcoolisées différemment. C’est le cas de la campagne social media #DIYCasanova. Par le moyen de tutos ludiques et créatifs, la marque de vins Casanova indique à ses consommateurs différentes façons de donner une seconde vie aux bouteilles et bouchons en liège.

Pour plus d’informations, nous vous laissons ci-dessous une infographie très complète de l’ARPP, concernant l’application de la loi Evin dans le domaine digital.

Loi Evin; Infographie; ARPP; digital
Source: ARPP

Pour découvrir les réseaux sociaux de Lutina cliquez sur les liens Facebook et Instagram.

Pour découvrir les réseaux sociaux de 1735 cliquez sur les liens Facebook et Instagram.

Pour découvrir les réseaux sociaux de Casanova cliquez sur les liens Facebook et Instagram.

 

Sources: (1), (2), (3):  La loi EVIN sur internet, www.anpaa.asso.fr

 

Loi Evin et réseaux sociaux: nouvelle donne?

reseaux sociaux alcool

Même si l’expression peut paraître pour le moins inappropriée, nous fêtons les 25 ans de la promulgation de la Loi Evin. Et tout récemment, il y a eu de la nouveauté dans l’air. En effet, un nouvel article de la Loi sur la santé de Marisol Touraine vient assouplir les restrictions concernant les boissons alcoolisées. Qu’est ce qui change concrètement avec cette loi? Il est finalement toujours aussi difficile d’y répondre de façon certaine, mais on peut tout de même essayer d’en établir les frontières.

Comment un vignoble doit-il communiquer sur l’espace numérique à l’heure d’aujourd’hui? Quelles sont les nouvelles barrières pour une brasserie artisanale? Jusqu’où peut aller un producteur de liqueur sans – bien entendu – faire l’apologie de l’alcool? Comment promouvoir son activité sans se heurter à cette loi? Autant de questions pertinentes que doivent se poser les producteurs de vins, cidres, bières etc…

Depuis son instauration en 1991, peu de choses avaient évolué malgré le fait que la société de consommation ait pour sa part beaucoup changé. L’aspect numérique avait été évoqué en 2009 pour combler le vide juridique engendré par internet. Mais finalement, le flou était toujours de mise. Les réseaux sociaux, bien qu’existant déjà, n’étaient pas encore ces machines marketing que l’on connait. Le gouvernement aurait pu anticiper la montée en puissance du webmarketing, mais bon… en général l’anticipation n’est pas une des vertus premières des différents gouvernements passés depuis 15 ans (surtout dans le domaine numérique). En clair, l’essence de la loi Evin s’appliquait pour les réseaux sociaux et l’espace numérique. C’est-à-dire : pas de publicité ni d’image valorisante de la consommation d’alcool.

Ce que dit l’article 13 de la loi de modernisation de notre système de santé

Art. L. 3323-3-1.-Ne sont pas considérés comme une publicité ou une propagande, au sens du présent chapitre, les contenus, images, représentations, descriptions, commentaires ou références relatifs à une région de production, à une toponymie, à une référence ou à une indication géographique, à un terroir, à un itinéraire, à une zone de production, au savoir-faire, à l’histoire ou au patrimoine culturel, gastronomique ou paysager liés à une boisson alcoolique disposant d’une identification de la qualité ou de l’origine, ou protégée au titre de l’article L. 665-6 du code rural et de la pêche maritime.

 

A qui concrètement cette loi s’adresse t-elle? Voilà ce que dit l’article L.665-5.

Le vin, produit de la vigne, les terroirs viticoles ainsi que les cidres et poirés, les boissons spiritueuses et les bières issus des traditions locales font partie du patrimoine culturel, gastronomique et paysager protégé de la France.

Le texte est assez clair: les producteurs de vins, boissons issues des traditions locales (liqueur etc…), cidres, poirés et bières artisanales… sont autorisés à communiquer. Mais jusqu’où peut-on aller dans cette communication ?

Un nouvel eldorado pour la publicité?

Selon ses partisans, cet amendement sert à clarifier la loi Evin (ah bon…). En fait, les lobbyistes expliquent que cela permettra aux journalistes d’éviter qu’ils s’autocensurent. En d’autres termes, les articles ou contenus traitant d’une région de production ou d’une indication géographique ne sont pas considérés comme de la publicité mais de l’information. Est ce clair?

Pas vraiment…

Car finalement à travers cet amendement, il suffira que la boisson alcoolisée puisse justifier d’une origine géographique vérifiée. Facile non. Car tous les producteurs de France et de Navarre entrent dans cette catégorie. En fait, il faudra surtout justifier le fait que le lieu de production ne soit pas délocalisé…

Où est la limite de la loi Evin?

Pour les détracteurs du nouvel amendement, il n’y a plus de limite car « information » veut de facto dire « publicité » (dissimulée). Cela libère la parole des alcooliers en leur permettant de toucher tous les supports de communication (télévision, cinéma etc…). En effet, selon ces détracteurs des émissions culinaires pourraient être sponsorisées par des marques d’alcool ou la météo d’Alsace pourrait faire la publicité des vins d’Alsace, puisque l’origine géographique est justifiée. Des séries britanniques pourraient être sponsorisées par un whisky écossais ou des publicités pour des séjours de dégustation de vins auraient leur place à coté des pubs pour les Caraïbes. Voilà la crainte principale des chantres de la prévention contre l’alcoolisme.

Leur discours est simple et articulé autour d’un nombre: 135. Il y aurait 135 morts par jour à cause de l’alcoolisme.  En augmentant l’exposition des boissons alcoolisées, la consommation d’alcool va automatiquement augmenter. On peut imaginer qu’une star devienne l’égérie d’une marque de champagne comme elle aurait pu l’être pour une marque de parfum. Ce qui tournera le jeune public vers l’alcool.

Voilà la vision fantasmagorique que pourrait causer cet amendement par les différents responsables des associations de lutte contre l’alcoolisme. Pour être clair, ce sera l’apocalypse.

Ce ne sera pas porte ouverte sur tout

En réalité, l’amendement ne change finalement pas beaucoup de choses concernant la publicité pour les marques d’alcool et la composante numérique qui nous intéresse. En effet, l’amendement permet aux producteurs d’apparaître dans des contenus dits « informatifs ». Par exemple, lorsqu’un documentaire ou un reportage est fait sur la région du Languedoc, des producteurs de vins pourront y apparaître pour présenter le produit (mode de fabrication ou impact sur le terroir de la région). Le fait de sponsoriser une émission serait assimilé à de la publicité pure et cela reste interdit. Pour résumer, les contenus incitatifs n’ont toujours pas lieu d’être.

Ricard et Evin
Par exemple, cette campagne ne respecte toujours pas la loi Evin

En conclusion, l’essence de la loi Evin est encore en vigueur. Rendre les boissons alcoolisées attractives n’est pas légale (à juste titre). Il y a juste eu une petite évolution en ce qui concerne le contenu dit informatif. Après tout, comment parler de la Bourgogne sans parler de vin.

En ce qui concerne les réseaux sociaux, les barrières semblent toujours être les mêmes. Les marketeurs doivent se réguler par eux même et essayer de ne pas franchir la ligne rouge avec un slogan aguicheur. Car il ne suffit pas de mettre les mentions légales pour être dans la légalité, il faut que le contenu soit pensé de façon à mettre le produit en valeur sans pour autant qu’il soit incitatif ou trop bienveillant.

Pour finir, on peut parler de vin, mais il ne faut pas dire qu’il est bon (on vous explique comment faire dans un de nos précédents articles). Par contre on peut toujours pester contre le fait que le média digital ne soit pas vraiment pris en compte.

 

Réseaux sociaux et spiritueux : 5 pages Facebook

Cinque de Mazo

Marques d’alcool et publicités ne font pas bon ménage en France. En effet, la loi Evin ne permet pas les mêmes folies publicitaires que nos voisins européens. Pour autant, cette loi – d’un autre temps – peut être plus ou moins détournée, en faisant la part belle au storytelling. Pour rester dans les voies de la légalité, la règle générale est simple : ne pas donner une image bienveillante de l’alcool. En d’autres termes, il est interdit de montrer des gens en train de boire, des personnes s’amusant autour de ladite boisson, des bouteilles ouvertes. il faut aussi faire très attention au slogan afin qu’il ne soit pas incitatif.

Il est donc difficile pour un petit brasseur ou un petit vigneron de faire de la publicité sur les réseaux sociaux et internet en général. De plus, la part de subjectivité est importante pour juger un slogan ou une campagne publicitaire.

Néanmoins, nous allons voir un petit aperçu de ce qui se fait à l’étranger. Nous avons sélectionné 5 marques de spiritueux qui communiquent sur les réseaux sociaux et plus particulièrement sur Facebook.

Big Peat

Whisky
Page de couverture Facebook de Big Peat

Big Peat est un whisky écossais provenant de l’ile d’Islay. Pour être plus précis c’est un Blended Malt (assemblage de single malts) assez tourbé. Ne vous méprenez pas sur la qualité de ce whisky à la vue du packaging car il a été élu meilleur pur malt écossais en 2010. Ce qui marque de prime abord avec Big Peat, c’est bien le personnage de « Big Peat » sur la bouteille. On note le jeu de mot avec Peat voulant dire en anglais tourbe.

Pour ce qui est de leur page Facebook, Big Peat a décidé de jouer sur cette gueule atypique. Les posts sont humoristiques et les visuels mettent souvent en scène cette sale trogne. De notre point de vue, c’est assez réussi (et ils nous font bien rire), ils font la part belle à l’actualité en pratiquant le newsjacking.

Big Peat
A l’occasion de la sortie d Avengers 2
big peat 2
Pour la St Valentin

 

Highland Park Whisky

Highland whisky
Page Facebook du whisky de Thor

Highland Park est aussi le fruit d’une distillerie écossaise. Leur whisky vient des îles Orcades au nord des cotes écossaises. Highland Park est une des dernières distilleries qui malte une partie de sa propre orge, elle utilise aussi sa propre tourbe. Highland Park nous raconte l’histoire des dieux scandinaves aux travers de cuvées spéciales qui répondent au nom d’Odin ou Thor. Il faut savoir que les iles Orcades ont longtemps été sous domination viking, ce qui explique surement cela. La posts et les visuels font directement références aux Valhalla. Cette marque s’appuie sur un storytelling basé sur cette mythologie passionnante, et on peut dire qu’ils arrivent à captiver l’internaute par le coté mystique de la chose.

Odin whisky
Odin pour Highland Park
whisky ads
Odin arrive

 

Jose Cuervo

 

Cinque de Mazo
Page de couverture de la fameuse Tequila

Jose Cuervo est la marque de Tequila la plus vendue au monde. Jose Cuervo propose aux internautes de raconter leur Cinco de Mayo. Le cinco de mayo correspond au 5 mai, la fête nationale au Mexique. Les internautes postent leurs histoires les plus extravagantes et inventives, et Luis Guzman (acteur hollywoodien connu pour ses seconds rôles) les raconte en vidéo. Jose Cuervo met à contribution ses fans d’une façon assez fun et ça fonctionne plutôt bien.

 

The Glenrothes

Whisky scotland
Page de couverture Facebook de ce single malt

On repart dans le whisky écossais avec la marque Glenrothes. C’est un single malt de très bonne qualité. Pour sa communication Facebook, la distillerie poste des vidéos d’un spécialiste du whisky qui nous explique les arômes et les goûts que l’on peut retrouver dans ce single malt. Il serait impossible de faire ce genre de vidéo en France, car se serait mettre l’eau à la bouche aux potentiels consommateurs. Car avec la loi Evin, on ne doit retirer aucun plaisir gustatif avec un quelconque breuvage alcoolisé.

 

Rock Oyster

huitres
Les huîtres sont à l’honneur

Comme son nom l’indique, la communication de ce blended whisky des îles écossaises est basée sur les huîtres. Oyster signifiant « huître » en anglais, cela nous donne des visuels et des allusions en rapport avec l’ostréiculture. Rock Oyster appartient au même groupe que Big Peat donc on peut s’attendre à une communication maîtrisée et surtout constante.

social media alcool
La bouteille autour d’huîtres

Certaines de ces campagnes ne sont pas envisageables en France. Mais le Storytelling est possible. Les marques Highland Park ou Big Peat pourraient très bien exister en France. Mais il faudrait supprimer tous les visuels montrant des gens heureux de boire de l’alcool. Il ne faut surtout pas valoriser son produit en lui-même mais on peut jouer sur son background sans problème.

Loi Evin et réseaux sociaux

Ricard et Evin

Communiquer sur les réseaux sociaux lorsque l’on est une marque de boisson alcoolisée, c’est compliqué. Sans pour autant contourner la loi Evin, on peut pour autant s’en accommoder sans être hors la loi.

On va déjà s’attacher à décrire la loi en quelques mots. La loi Evin, datant de 1991, réglemente la publicité pour l’alcool et le tabac. La consommation d’alcool et de tabac était devenue le cheval de bataille en terme de politique de santé publique. Concernant l’alcool, la loi stipule que seul l’affichage, la radio (sur certaines tranches horaires) et la presse (hors titres jeunesse) peuvent être utilisés. Le message doit systématiquement rappeler que « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ». Cette loi a été mise à jour en 2009 pour répondre au vide juridique engendré par internet. Logiquement l’essence de la loi reste la même; mais il est aujourd’hui difficile de statuer pour tout ce qui touche aux plateformes média sociales. En d’autres termes, il n’y a pas d’interdiction précise d’une quelconque plateforme sociale.

La loi Evin est d’ailleurs la plus restrictive au monde en terme de législation encadrant les boissons alcoolisées. Ce qui est paradoxale lorsque l’on connait la qualité de notre vin ou champagne. On peut même douter de l’efficacité de celle-ci. En effet, depuis une cinquantaine d’années les français ont commencé à moins consommer de l’alcool, soit bien avant l’instauration de cette loi. Cette décrue s’est accélérée grâce aux campagnes de prévention, et la lutte contre l’alcool au volant ayant aussi joué un rôle prépondérant.

Revenons à ce qui nous intéresse, en l’occurrence la communication des marques de boisson alcoolisée sur les réseaux sociaux.

L’ANPAA censeur en chef

L’ANPAA (l’Association Nationale de Prévention en Alcoologie et en Addictologie) veille au grain sur les différentes stratégies digitales touchant à l’alcool.

Logo loi Evin
Le logo de l’association

Pour ainsi dire, ils ne veulent pas de viticoles, de brasseurs ou de fabricants de spiritueux sur les réseaux sociaux sous prétexte que ceux-ci sont fréquentés majoritairement par des jeunes mineurs (ce qui est faux puisqu’ils ne sont que 5,7%). L’aspect intrusif des publications est aussi mentionné. En effet, sur un fil d’actualité Facebook par exemple, on peut avoir un ami qui like des visuels Jack Daniels sans qu’on ait notre mot à dire. On peut dire que l’ANPAA jouit d’une méconnaissance totale d’internet et des nouvelles technologies. Son président Alain Rigaud déclare qu’il faudrait contrôler Facebook et les réseaux sociaux en général comme dans certains pays comme Chine. Bien qu’il nuance plus tard ses propos, on a compris le fond de sa pensée. Vive les dictatures qui interdisent Internet. Par la suite il décrit le monde numérique comme un repère de sites racistes, pédophiles, extrémistes, nazis… Oui c’est bien connu, Le Diable a investi le web. Je vous invite à lire son interview publiée sur le blog Rue89 afin de vous faire votre propre idée sur cette institution anachronique.

Loin de nous de faire l’apologie de l’alcool, la consommation excessive d’alcool est dangereuse pour la santé. L’alcoolisme est aussi un vrai fléau et bien entendu il faut intensifier la prévention contre l’alcool au volant. Néanmoins, il faut penser aussi à la survie des petits producteurs qui n’ont pas les moyens marketing d’une grosse entreprise. Pour eux, l’avènement d’internet devrait leur permettre de faire connaître leur produit à moindre coût. C’est pour cela qu’il faut être intelligent dans son message pour ne pas faire d’appel à la consommation.

Les condamnations

Plusieurs entreprises ont été condamnées ces dernières années. Le cas le plus connu est celui du groupe Pernod Ricard. La célèbre marque de spiritueux a été sanctionnée pour sa campagne « Un Ricard, des rencontres » lancée en juin 2011.

Ricard réseaux sociaux
Un visuel de cette campagne

Le but de cette campagne était de partager grâce à une application des recettes de cocktails à base de pastis sur son mur. Or pour la justice, ce partage s’apparentait à de la publicité intempestive. En effet, partager sur son mur à son réseau d’ami est assimilé à de la publicité. Les juges ont souligné son caractère inopiné et systématique. Avec du recul, on peut aussi critiquer le slogan qui incite à la consommation. En effet, on peut comprendre que boire du pastis aide à se sociabiliser.

Heineken a aussi eu maille avec l’ANPAA pour sa campagne célébrant ses 140 ans d’existence.

Heineken bouteille
La campagne Heineken pour son anniversaire

Il fallait que l’internaute crée un design unique pour la bouteille anniversaire. On a reproché à Heineken d’inciter à « liker » la marque sur Facebook en faisant miroiter un concours et des lots à gagner. On peut comprendre l’ANPAA, l’incitation à participer est claire. En likant, l’internaute s’expose à recevoir le contenu promotionnel de la marque. Heineken a par la suite retiré tout ce contenu  et a été condamné à verser des dommages et intérêts à l’association.

Ce qu’il ne faut pas faire en général sous peine d’être complètement hors la loi:

  • Ne pas inciter l’internaute à liker sa page ou à suivre un de ses comptes
  • Eviter de faire des jeux concours. C’est clairement du racolage.
  • Ne pas vanter les vertus de l’alcool par n’importe quel support (vidéo, photo, statut)
  • Ne pas partager des photos mettant en scène des gens buvant de l’alcool (et encore moins ayant l’air de s’amuser)

L’exemple des vins d’appellation « Côtes du Rhône » est assez parlant.

Publicité épinglée
Publicité épinglée

Ce qui lui est reproché est assez évident finalement. On peut comprendre ce visuel ainsi: en buvant du vin on prend gout à la vie, en buvant du vin on peut agréablement planer, s’élever. Ce visuel donne une bonne image de la consommation d’alcool, ce qui est interdit.

Ce qu’il faut faire

Un viticulteur ou un brasseur par exemple doit appuyer son message sur l’histoire de son produit.  Le storytelling est d’une importance capitale. Il faut que la marque joue à fond ce jeu comme l’a si bien fait la bière Amsterdam. La légende du navire « le Hollandais volant » leur permet de raconter une histoire et donc de capter l’attention des internautes.

Les marques jouent aussi beaucoup sur le visuel de leur bouteille. En effet la bouteille fermée n’incite pas clairement à la consommation (parait-il). Personne ne vient la boire ou l’ouvrir. Il faut faire preuve de créativité pour créer des visuels attractifs sans pour autant montrer des consommateurs, ni même vanter les bienfaits de l’alcool. Il faut insister sur le design du conditionnement.

Jura
La bouteille de whisky Jura

 Révéler les secrets de fabrication est aussi un bon moyen de capter une audience. On entre ici dans une transmission de savoir-faire. C’est l’artisan qui présente son produit, son vin ou sa bière. Montrer les étapes de fabrication ou lieu sans pour autant susciter l’envie de boire.

 

Jack
Jack Daniels et son affinage

Ce ne sont pas des conseils pour passer outre la loi Evin. Ce sont juste des moyens de communiquer sur son produit sans pour autant être responsable d’une consommation excessive. Il ne faut surtout pas oublier:

  • Mettre un filtre: Interdit au mineur
  • Ne pas oublier: l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A Consommer avec modération.
  • Bien faire attention au slogan

En conclusion, et quoi qu’il arrive, il faut  se conformer à la loi Evin. Certaines marques ne la respectent pas totalement. Mais ce n’est pas une raison pour les suivre dans cette voie. Le vide juridique entourant les réseaux sociaux est bien réel, mais inutile d’en profiter. Car n’oublions pas que l’alcool consommé avec excès tue. Communiquez sans faire dans le racolage ou l’incitation à la consommation et vous serez totalement dans votre droit.

 

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